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Sur le nom de Louis-de-Gonzague Bessette, curé de Saint-Magloire dans Le ciel de Québec de Jacques Ferron

Par Simon Labrecque, Montréal | cet article est aussi disponible en format pdf

Résumé

Le présent article propose une enquête intertextuelle sur le contexte et les effets du choix de Jacques Ferron de baptiser Louis-de-Gonzague Bessette le curé de Saint-Magloire de Bellechasse, un personnage-clé de son roman Le ciel de Québec, paru en 1969. Ce choix témoigne du souci de Ferron de travailler, par la fiction, les enjeux du métissage et des autres modes de relation entre Canadiens français et Autochtones, dans la deuxième moitié des années 1960. Ce travail s’effectue notamment à partir de la matière textuelle que Jacques Ferron trouve, en collaboration avec sa sœur Madeleine, dans les monographies de paroisse et les autres documents qui témoignent de la vie des classes populaires en territoire québécois.

Dans le petit monde de la grande ferronnerie, il est bien établi que le nom donné par Jacques Ferron à l’ancien curé de la paroisse de Saint-Magloire dans Le ciel de Québec (éd. du Jour, 1969), Louis-de-Gonzague Bessette, fait référence au critique et écrivain Gérard Bessette. C’est Ferron lui-même qui l’écrit dans une lettre à Yvan Lamonde, datée du 26 novembre 1968, alors qu’il était à composer son plus gros[1], sinon son plus grand roman :

Je vous écris à l’imparfait parce que j’en ai déjà fini avec Sainte-Catherine [de la Jacques-Cartier] ou à peu près, et que j’ai ramené mon récit à Québec pour le relancer vers Mastaï et l’abbé Louis-de-Gonzague Bessette (ainsi nommé en l’honneur de Gérard), vicaire incendiaire et futur curé-fondateur de la paroisse Sainte-Eulalie, ex-village des Chiquettes, dont le pôle s’oppose à celui de Saint-Catherine[2].

C’est la première occurrence d’un avatar de Gérard Bessette dans l’œuvre de Ferron. Plusieurs autres suivirent, et Bessette lui-même rétorqua en incluant des références à Ferron dans certains de ses écrits, créant une constellation unique de « personnages réciproques »[3]. Dans Le ciel de Québec et ailleurs, Ferron s’amuse en outre à rapprocher le nom de l’anticlérical Gérard de celui du très pieux thaumaturge frère de Sainte-Croix André Bessette, mieux connu sous le nom de saint Frère André.

Si cette origine joueuse du patronyme Bessette est bien établie, personne ne semble s’être penché sur la source du prénom du curé de Saint-Magloire dans Le ciel de Québec, Louis-de-Gonzague. Il n’est pourtant pas très sorcier, aujourd’hui, de la trouver, cette source. Le prénom évoque d’abord un jeune étudiant jésuite, mort à Rome au service des pestiférés en 1591 et canonisé sous le nom de saint Louis de Gonzague en 1726. Mais, par ailleurs, et sauf erreur de ma part, personne n’a encore insisté sur le fait que, très tôt dans la monographie de la véritable paroisse de Saint-Magloire de Bellechasse apparaît un dénommé « Ls de Gonzague ». Ce livre, simplement intitulé Monographie de Saint-Magloire de Bellechasse, a été publié par l’abbé Wilfrid Roy en 1925[4]. Ne tient-on pas là une origine toute simple, plus que plausible, pour le nom du curé du village fabulé de Saint-Magloire? La vérité historique aurait ainsi nourri la fiction, tout simplement.

Mais pourquoi ce « Ls de Gonzague » aurait-il intéressé Jacques Ferron, ou pourquoi ce dernier aurait-il remarqué ou retenu le nom du premier, même à son insu? Après tout, la présence de « Ls de Gonzague » dans un texte sur Saint-Magloire pourrait n’être qu’un hasard sans conséquence. De surcroît, il semble que la monographie en question ne fasse pas partie de la bibliothèque personnelle qui a survécu à notre auteur. A-t-il jamais feuilleté ce livre? Cette absence de la bibliothèque personnelle de Ferron ne signifie pas, bien entendu, que celui-ci n’ait jamais lu la monographie de Saint-Magloire écrite par l’abbé Wilfrid Roy. Il aurait très bien pu la consulter ailleurs. Une part des lectures de l’auteur reste à jamais inaccessible à ses lecteurs.

Dans le cas qui nous préoccupe, cependant, un échange épistolaire entre Jacques Ferron et sa sœur Madeleine nous apprend que cette dernière a justement fait connaître la monographie de Saint-Magloire à son frère ainé, en janvier 1969[5]. Madeleine écrit : « Il y a aussi les monographies de paroisse. Je tâcherai de t’apporter celle de Saint-Magloire de Bellechasse en fin de semaine, un modèle dans le genre : travail du curé de la paroisse. » Tout indique que Madeleine Ferron a bel et bien apporté le livre en question de Saint-Joseph de Beauce à Longueuil, car dans une lettre datée du 3 février 1969, Jacques Ferron commente longuement l’ouvrage en signalant les passages les plus marquants. Il parle surtout du curé-fondateur, Camille-Stanislas Brochu, et du troisième curé, Jean-B.-G. Boulet. Il termine sa lettre par ces mots :

Voilà, chère Merluche. Je te remercie du livre. Un de ces jours j’irai voir le grand autel français de Saint-Magloire, le portrait de Messire Camille-Stanislas dans la sacristie et peut-être monterai-je sur le Bonnet, l’antagoniste du Champ-Grelot, d’où l’on peut voir onze clochers « quand l’aquilon dissipe les nuées ».

Rien ne laisse croire que ce voyage se soit concrétisé. L’enthousiasme de Jacques Ferron pour la monographie de Wilfrid Roy est toutefois indéniable!

Néanmoins, cet échange épistolaire daté de janvier et février 1969 ne saurait démontrer que la monographie de Saint-Magloire est la source directe du prénom du curé Louis-de-Gonzague Bessette dans Le ciel de Québec, puisque la lettre à Yvan Lamonde citée plus haut, qui contient déjà ce nom, est datée de novembre 1968. Il serait plus adéquat d’écrire que la monographie en question est l’une des sources du prénom. Je crois ainsi pouvoir montrer que la rencontre du nom « Ls de Gonzague » sous la plume de Roy a pu nourrir l’écriture de Ferron, si ce n’est qu’en lui suggérant qu’il avait bien choisi, c’est-à-dire que sa fiction se rapprochait adéquatement de la réalité pour l’éclairer d’un jour inédit.

Qu’en est-il de cette présence d’un certain « Ls de Gonzague » dans la monographie de Saint-Magloire? Fait étonnant, elle est liée de très près à un phénomène qui intéressait Ferron au plus haut point dans la deuxième moitié des années 1960 : les origines autochtones de certains toponymes, et même de certains patronymes, au Québec.

L’intérêt de Jacques Ferron pour cette question est évident dans sa correspondance avec sa sœur Madeleine. Au mois d’août 1965, les deux s’échangèrent une série de lettres portant sur l’histoire des Abénakis dans la Beauce, à partir d’informations trouvées dans des ouvrages des abbés Joseph-Pierre-Anselme Maurault et Honorius Provost[6]. Dans ces lettres, il est notamment question de la migration des Abénakis de la Nouvelle-Angleterre vers le comté de Dorchester, puis vers leurs territoires actuels d’Odanak, sur la rivière Saint-François tout près de Pierreville, sur la rive sud du Saint-Laurent, en face du comté de Maskinongé, et de Wôlinak, sur la rivière Bécancour. La tribu fictive des Chiquettes vit plus à l’est, à la frontière des territoires qui furent habités par les Abénakis, les Malécites, les Etchemins (possiblement un autre nom des Malécites) et d’autres peuples autochtones.

Près de dix ans plus tard, Madeleine Ferron se servira notamment de ces échanges pour structurer la section inaugurale du livre Les Beaucerons ces insoumis, intitulée « La société primitive »[7]. Pour sa part, Jacques Ferron reprendra les intuitions et les conclusions exprimées dans ces lettres sur le métissage, et même sur les déplacements des Abénakis, dans plusieurs autres textes, dont les premiers paragraphes de la deuxième partie de son roman La chaise du maréchal ferrant[8]. Dans ces lignes, nous rencontrons justement le nom qui nous intéresse : Louis de Gonzague. En brodant un récit sur les origines de son personnage Jean Goupil, Ferron écrit :

L’Amérindien pouvait se franciser en ne gardant de son nom antérieur que des syllabes françaises comme il en fut pour les Nolet [Wawanolet], mais le plus souvent ils optaient pour leur nom de baptême, et comme il y a eu un aumônier et un chef de la nation des Abénakis qui portèrent le nom de Louis de Gonzague, on peut se demander si la plus grande partie de nos Jean Goupil ne nous est pas venue par le truchement du premier sacrement[9].

En fait, un passage fort similaire se retrouve déjà dans Le ciel de Québec, au début du chapitre XVIII, alors que le récit revient justement de l’Ouest canadien et de Saint-Catherine-de-la-Jacques-Cartier vers Québec, Beauport et l’institut psychiatrique Saint-Michel-Archange (Robert-Giffard), aussi surnommé Mastaï, comme il est dit dans la lettre de 1968 à Yvan Lamonde. De retour au palais cardinalice, Mgr Camille (Roy) rapporte longuement au cardinal Rodrigue (Villeneuve) sa rencontre avec l’abbé Louis-de-Gonzague Bessette. Il se permet une digression apparente :

– Cet abbé, Éminence, est le fils de sa mère, brave dame portée à la perfection chrétienne, ancienne institutrice. Elle a épousé un rustaud. Son fils est sa revanche. Chose curieuse, elle l’a revendiqué dès sa naissance : Louis-de-Gonzague est son propre nom de famille.

– Gonzague? Une italienne alors?

– J’en douterais : nous avons une famille de ce nom à Pierreville. Quand j’ai étudié la vie de Charles Gill, je l’avais rencontré dans son ascendance. Il s’agit d’un nom de baptême, devenu patronyme, qui remonte sans doute aux anciens jésuites. Un curé de Pierreville l’a porté, de même qu’un des chefs de la Réserve. Il est normal de le retrouver dans la Beauce : avant de se rabattre sur celui de la rivière Saint-François, les Abénakis avaient leur domaine dans les bassins de la Chaudière et de la Kennebec, deux rivières qui s’aboutent et font chemin de Québec à Boston. Autrefois, tous les Américains étaient des Bastonnais, ainsi nommés par les Abénakis. Le nom avait fait fortune en Nouvelle-France. Les gouverneurs eux-mêmes l’employaient dans leurs rapports au roi.

– Ah! Vous revoilà, vous, avec vos métis!

– D’autant plus plaisants à dénicher qu’on a tout fait pour les cacher. Tout prénom employé comme patronyme ouvre une piste. Les Joseph, les Michel de la baie des Chaleurs sont assurément des métis. Il arrivait aussi que le Sauvage ne gardait de son nom amérindien qu’une partie, celle qui avait une résonance européenne. Tous nos Nolet, Nolette, Nolette se nommaient à l’origine Wawanollett.

– Très intéressant, Monseigneur Camille, mais revenons, voulez-vous bien, à l’abbé Bessette.

– Éminence, je ne l’ai pas quitté!

– Vous trouvez?

– En effet, s’il est le fils de sa mère, Marie-Josephte Louis-de-Gonzague, sa parenté ne se trouve pas à Saint-Magloire, mais dans sa future paroisse [de Sainte-Eulalie, l’ancien village des Chiquettes], plus près de Moïse à Joseph à Chrétien [le chef métis] que de tous les Bessette de la terre, à l’exception peut-être du frère André[10].

Les liens établis entre Saint-Magloire et Pierreville, via les Abénakis et le nom Louis-de-Gonzague, à la fois prénom et patronyme, suggèrent que ce passage a été écrit, ou qu’il a du moins été renforcé, suite à la lecture de la monographie de Wilfrid Roy.

Le dénommé « Ls de Gonzague » qui est cité dans la monographie de Saint-Magloire de Bellechasse est évoqué, voire invoqué, à titre de spécialiste de la langue abénakise, par Wilfrid Roy. Ce dernier commence son livre par une présentation de la mission du canton Roux, dans Bellechasse. La section intitulée « Situation géographique » est rapidement suivie d’une section intitulée « Origine des noms », où il est question des noms de saint Magloire, du chemin Mailloux et des cantons Roux, Bellechasse, Rolette, Panet et Daaquam. Ce dernier canton « porte le nom de la rivière qui le borne au nord. Cette rivière fut appelée ainsi parce qu’elle porte beaucoup d’eau. Daaquam a, dit-on, cette signification en indien »[11]. À cette dernière phrase, Roy adjoint cette longue note :

Ces renseignements proviennent du Bulletin des Recherches Historiques et des Noms géographiques de la Province de Québec, de M. Pierre-Georges Roy.

Au sujet de ce mot Daaquam, nous croyons que son origine vient d’un mot indien; les Canadiens lui ont fait probablement subir des modifications qui lui donnent l’apparence d’un mot latin. En 1860, les plans géographiques des arpenteurs indiquent le nom de cette rivière Daaquam, ce qui anéantit les légendes de certains hommes qui prétendent que ce nom a été donné tout récemment par quelque chasseur assoiffé.

Nous avons écrit à un missionnaire canadien, M. de Gonzague, qui connaît bien la langue des Abénakis, pour connaître l’origine de ce mot. Voici la réponse qu’il nous adressa[.][12]

Suit une transcription d’une lettre de ce M. de Gonzague à Wilfrid Roy.

Odanak, 17 novembre 1924.

Mon cher M. Roy,

Mes interprètes ont eu de la misère avec votre Daaquam; il n’y a pas de Daaquam dans la langue abénakis aujourd’hui. On pense que ce mot a subi des modifications. Nous avons dans la langue abénakis le mot jaquam, qui veut dire : le gros bout d’un billot, la botte d’un billot. Ce mot se prononce oudzaquam; le j se prononce dj. Il y a plusieurs mots qui se terminent en quam, tel que applesquam, pommier, azawanim-naquam, prunier; les arbres fruitiers se terminent en quam.

Il faudrait savoir si la rivière Daaquam a un autre nom, soit français, soit anglais; quelle est sa source, son embouchure, si elle est navigable; le terrain est-il plat ou montagneux, de quelle sorte de bois est-il boisé? Des sauvages ont-ils déjà eu des habitations en cet endroit? Autant de questions qui aideraient les [A]bénakis à trouver l’origine du mot Daaquam.

La plupart de ces mots ont été changés pour [en] faciliter la prononciation.

Voilà à peu près tout ce que nous pouvons dire de ce mot.

Espérant que ce peu de renseignements vous serviront à quelque chose, je me dis,

Votre tout dévoué,

Ls de Gonzague, ptre, miss[13].

Serait-ce l’aumônier de Gonzague dont il est question dans La chaise du maréchal ferrant? Serait-ce le curé Louis-de-Gonzague, de Pierreville, dont il est question dans Le ciel de Québec? Cela est peu probable, car son homonyme, le chef abénakis Louis de Gonzague, ou Degonzague, était déjà mort en 1924 : il est né à Odanak en 1798, de Louis de Gonzague et Cécile Hannis, et est mort à Odanak en 1870[14]. Ce chef eut toutefois neuf enfants avec Louise Onlinasse, puis neuf autres avec Théotiste Courchesne. Parmi les enfants de cette dernière union se trouvent Louis-Philippe de Gonzague (né le 21 août 1847), Louis-de-Gonzague de Gonzague (né et baptisé le 20 février 1854, mort le lendemain), Louis-Napoléon de Gonzague (né le 6 octobre 1864) et Joseph de Gonzague (né le 6 octobre 1865)[15].

Fait intéressant, le dernier né de cette lignée, Joseph de Gonzague, est répertorié comme membre du clergé catholique, bien que la date de naissance qui lui est attribuée dans le Dictionnaire biographique du clergé canadien-français semble plutôt avoir été celle de son frère ainé, Louis-Napoléon.

GONZAGUE (L’abbé Joseph de), né à Pierreville, comté d’Yamaska, le 4 octobre 1864, de Louis de Gonzague et de Théotiste Courchesne, fit ses études à Nicolet, où il fut ordonné le 30 août 1891. Vicaire à Saint-Zéphirin (1891-1892), à Saint-Pierre-les-Becquets (1892-1893), à Saint-Grégoire-de-Nicolet (1895); curé des Abénaquis de Pierreville, depuis 1895[16].

Dans un article récent du quotidien trifluvien Le Nouvelliste, il est écrit que cet abbé Joseph de Gonzague s’est retrouvé dans une situation assez rare : il fut prêtre missionnaire chez son propre peuple, les Abénakis[17]. Dans l’article, nous apprenons en outre qu’il donna son dernier sermon le 19 mai 1935 et qu’il mourut le 23 juillet 1937. Notons ce hasard objectif : il s’agit là de l’année durant laquelle se déroule l’action du Ciel de Québec. Jacques Ferron aurait-il vu dans ces faits un signe, par exemple à l’effet que le prénom de Louis-de-Gonzague, choisi pour son curé Bessette, pouvait aussi honorer l’abbé Joseph de Gonzague?

S’il ne fait pas directement référence à l’abbé Joseph de Gonzague, il semble néanmoins que Ferron ait trouvé chez les Abénakis ce prénom singulier de Louis-de-Gonzague. Dans le contexte historique qui intéressait Ferron, les prénoms et les patronymes semblent avoir subi de nombreuses modifications sans qu’une règle stricte puisse permettre de les retracer ou de les déchiffrer. Ces questions prennent aujourd’hui une intensité politique insoupçonnée, dans le contexte des débats contemporains sur les « Métis de l’Est ».

Quoi qu’il en soit, ce rapprochement du nom du fictif curé Bessette du monde véritable des Abénakis de la rive sud du Saint-Laurent, monde tramé de multiples pistes entre Sorel et Kamouraska, nous permet de mieux comprendre au moins deux réalités.

D’abord, cela permet de mieux saisir le nom même de la nouvelle paroisse du Ciel de Québec, Sainte-Eulalie. En effet, la paroisse de Sainte-Eulalie, au Québec, se trouve précisément dans la région de Nicolet-Yamaska, près de Pierreville et d’Odanak, d’où provenait le véritable abbé de Gonzague. L’érection canonique de Sainte-Eulalie fut décrétée le 3 octobre 1857.

Ensuite, ce rapprochement permet d’interpréter cette remarque critique selon laquelle Louis-de-Gonzague Bessette serait « issu lui-même du petit village et vraisemblablement de souche amérindienne »[18]. Cette observation ne va pas de soi, même pour qui a lu le roman plus d’une fois, car nous retenons surtout l’hostilité initiale du curé Bessette à l’endroit du « petit village » des Chiquettes. Cependant, le récit n’est pas seulement l’histoire de « l’enquebecquoisement » de Frank-Anacharsis Scott. Il est aussi, parmi beaucoup d’autres récits encore, l’histoire d’une certaine reconversion du curé Bessette à l’amour de son prochain. En effet, Louis-de-Gonzague Bessette acceptera de devenir le pasteur de cette communauté des Chiquettes qu’il avait déjà tenté de faire périr dans les flammes, avec les chiens ensauvagés de la région du ruisseau des Chians, qui l’ont férocement mordu au sang, en retour.

Le ciel de Québec est le livre par excellence de la complication sans fin de toute origine. C’est notamment à ce titre qu’il nous reste aujourd’hui essentiel.

Au Canada, depuis 1996, le 21 juin est la Journée nationale des peuples autochtones. Dans le calendrier liturgique catholique, c’est aussi la fête de saint Louis de Gonzague (1568-1591), que le pape Pie XI a déclaré « patron céleste de toute la jeunesse chrétienne », le 21 juin 1925.


Notes

Je remercie Julien Vallières, Pierre Cantin et Marcel Olscamp pour leurs lectures, leurs commentaires et leurs recommandations, qui ont aidé à améliorer ce texte, dont une première version a été complétée en 2018.

[1] Jean Éthier-Blais, « La galette de Papa Boss », Le Devoir, 27 septembre 1969.

[2] Jacques Ferron, « Lettres à Yvan Lamonde », présentées par Yvan Lamonde, Littératures, no 2,1988, p. 143.

[3] Voir Guy Monette, « Gérard Bessette et Jacques Ferron : personnages réciproques », Voix et images, vol. 22, no 1 (« Effets autobiographiques au féminin »), automne 1996, pp. 126-147.

[4] Wilfrid Roy, Monographie de Saint-Magloire de Bellechasse, Québec, s.é., 1925. Remarquons que ce patronyme, Roy, reviendra à plusieurs reprises dans le présent texte, y compris dans la fiction de Ferron.

[5] Cet échange épistolaire m’a été signalé par Marcel Olscamp, alors qu’il préparait, avec Lucie Joubert, le troisième tome des correspondances entre Jacques Ferron, Madeleine Ferron et Robert Cliche, paru depuis chez Leméac. Les citations qui suivent proviennent des deux lettres en question, d’abord données à lire par le professeur Olscamp avec l’autorisation du fils de Jacques Ferron, Jean-Olivier Ferron. Elles sont désormais accessibles à toutes et à tous dans Jacques Ferron, Madeleine Ferron et Robert Cliche, Le monde a-t-il fait la culbute? Correspondances 3, 1966-1985, éd. préparée par Marcel Olscamp et Lucie Joubert, Montréal, Leméac, coll. « L’écritoire », 2019.

[6] Jacques Ferron, Madeleine Ferron et Robert Cliche, Le Québec n’est pas une île. Correspondances 2, 1961-1965, éd. préparée par Marcel Olscamp et Lucie Joubert, Montréal, Leméac, coll. « L’écritoire », 2015, pp. 507-523.

[7] Madeleine Ferron, avec la collaboration de Robert Cliche, Les Beaucerons ces insoumis. Petite histoire de la Beauce, 1735-1867, Montréal, Hurtubise HMH, 1974, pp. 15-56.

[8] Jacques Ferron, La chaise du maréchal ferrant, Éditions du Jour, 1972, pp. 61-66.

[9] Ibid., pp. 65-66.

[10] Jacques Ferron, Le ciel de Québec, préface de Luc Gauvreau, édition préparée par Pierre Cantin et Luc Gauvreau avec la collaboration de Marie Ferron et Gaëtanne Voyer, Montréal, Bibliothèque québécoise, 2009, pp. 178-179.

[11] Wilfrid Roy, Monographie de Saint-Magloire de Bellechasse, op. cit., pp. 11-12.

[12] Ibid., p. 12 (note).

[13] Ibid.

[14] Claude Jutras, « Degonzague », Site de données généalogies, [en ligne] http://www.cjutras.org/CJ_0D0287.html (page consultée le 23 janvier 2018).

[15] Ibid.

[16] J.-B.-A. Allaire, Dictionnaire biographique du clergé canadien-français. Premier supplément, Montréal, Imprimerie de l’École Catholique des Sourds-Muets, 1910,p. 77.

[17] Louis Caron, « Un missionnaire amérindien chez les Abénakis d’Odanak », Le Nouvelliste, 5 août 2011, [en ligne] https://www.lenouvelliste.ca/archives/un-missionnaire-amerindien-chez-les-abenakis-dodanak-2deb13d0b911cf95ac7101bc00e11ccc (page consultée le 23 janvier 2018).

[18] Alonzo Le Blanc, « Le discours social dans Le ciel de Québec, roman de Jacques Ferron », Québec français, no 92, hiver 1994, p. 75.

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